Depuis le début des manifestations antigouvernementales qui ont éclaté il y a un an, Dima Sadek, qui travaille aujourd’hui pour le site d’information indépendant Daraj, fait l’objet de menaces récurrentes. Comme à son habitude, la journaliste partage sur son compte Twitter des captures d’écran des messages qu’elle reçoit, le dernier en date remontant au 29 septembre. Elle est parallèlement visée par plusieurs plaintes en diffamation, dont une a été déposée par le ministre des Affaires étrangères en février dernier et une autre, en mai, par le gouverneur de la Banque du Liban, dont le nom apparaissait dans l'enquête réalisée par la journaliste sur des soupçons de corruption.
Luna Safwan a pour sa part été cyber-harcelée début octobre après avoir publié un tweet critique du Hezbollah, l’un des partis politiques les plus puissants du pays. Ce tweet a par la suite été repris par une chaîne israélienne, ce qui a conduit des militants à l’accuser de “justifier le narratif israélien” au sujet du mouvement chiite. Un membre de sa famille l’a même publiquement reniée.
Le 3 octobre dernier, c’est une rumeur qui a valu à la journaliste d’investigation Mahassen Moursel un déferlement de haine. D’après le compte à l’origine de la fausse information, elle avait été arrêtée pour avoir coopéré avec Israël, officiellement toujours en guerre contre le Liban. Elle a décidé lundi 5 octobre de déposer plainte contre l’auteur de cette publication.
Ce n’est pas la première fois que des journalistes libanaises subissent du harcèlement en ligne. En août dernier, la reporter de MTV Zena Basile avait partagé sur son compte une vidéo pour dénoncer l’agression qu’elle avait subie lors d’un reportage. En retour, des militants ont repris cette publication pour encourager à reproduire de telles attaques et à redoubler de violence contre les collègues de sa chaîne.
Les préjugés sexistes à l’encontre des femmes journalistes s’ajoutent aux pressions communautaires, dans un pays où la polarisation des médias amène les journalistes à être accusés de trahison lorsque leurs écrits sont jugés défavorables envers le parti politique ou la communauté religieuse à laquelle ils sont censés appartenir. En tant que femmes, le jugement qui leur est porté est d’autant plus sévère, et leur exposition médiatique dérange les milieux conservateurs.