Une centaine de manifestants et d'activistes ont manifesté lundi matin devant le palais de justice de Beyrouth, pour dénoncer la convocation du journaliste Jean Kassir, cofondateur du média Megaphone News, par la Sécurité de l'État.
Megaphone avait affirmé, vendredi, que le procureur général près la Cour de cassation Ghassan Oueidate est à l'origine de l'interpellation de Jean Kassir, qui serait due, selon le média, à une publication du 1er mars intitulée : "Le Liban gouverné par des responsables recherchés par la justice". Dans cette publication, figure le nom de M. Oueidate, en allusion aux poursuites lancées contre lui dans l'affaire de l'explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020.
"Des repris de justice poursuivent des journalistes", "Aux militaires nous disons : la presse est libre", "Les interrogatoires sécuritaires des journalistes sont illégaux", pouvait-on lire sur des pancartes brandies par des manifestants. Plusieurs protestataires, des membres du Rassemblement du syndicat alternatif de la presse et du Bloc national étaient présents sur les lieux. "Ghassan Oueidate, chabiha", scandait la foule, accusant le procureur d'être "un milicien au service du gouvernement". Une dizaine de militaires et des membres des Forces de sécurité intérieure (FSI) étaient déployés sur les lieux. Aucune tension n'a été signalée, selon notre journaliste sur place Matthieu Karam.
"Liberté fragile"
"Le sit-in auquel le Rassemblement du syndicat alternatif de la presse a appelé est une réaction naturelle au fait que des journalistes ne sont pas traités conformément aux normes, voire menacés", confie Jean Kassir à L'Orient-Le Jour. "Si l'un de nous est touché, nous sommes tous touchés", a-t-il poursuivi, déplorant le fait que "la liberté est très fragile au Liban". Le journaliste a également indiqué que l'affaire est désormais entre les mains du juge Oueidate, notant "ne pas avoir de problème à comparaître devant la justice, mais pas devant des organes sécuritaires". "La manière dont j'ai été convoqué et le fait de transformer des idées en affaires sécuritaires sont inacceptables. Les journalistes doivent comparaître devant un juge ou le Tribunal des imprimés", a-t-il dénoncé, assurant que le travail de Megaphone se poursuivra.
Présent sur les lieux, Jad Chahrour, porte-parole du centre SKeyes pour la liberté des médias et de la culture, a estimé de son côté que "le système judiciaire a prouvé son affiliation à la classe au pouvoir". "Il poursuit des journalistes qui ont dévoilé la vérité alors que c'est leur rôle", précise-t-il à notre publication, avant d'abonder : "On parle d'organes sécuritaires directement liés au pouvoir judiciaire politisé, qui protègent les partis et hommes politiques". La journaliste Doja Daoud a de son côté dénoncé "les pratiques militaires miliciennes" des autorités.