Fill in your email address to obtain the download verification code.
Enter the verification code
Please fill the fields below, & share with us the article's link and/or upload it:
upload file as pdf, doc, docx
SKeyes Center for Media and Cultural Freedom - Samir Kassir Foundation

Comédiens libanais poursuivis en justice : retour sur les cas les plus emblématiques

Vendredi 10 mai 2024

Ces dernières années ont vu une montée des poursuites contre les comédiens par les autorités libanaises, ce qui représente une menace pour la liberté d’expression dans le pays. Depuis mercredi, la comédienne Shaden Fakih est au cœur de la controverse suite à la diffusion en ligne d’une performance dans laquelle elle évoque l’islam. Jeudi, Dar el-Fatwa, la plus haute autorité religieuse sunnite du Liban, a soumis une demande d’ouverture d’une enquête judiciaire contre la jeune femme, l’accusant de « blasphème contre Dieu et le prophète Mohammad ».


En 2022 déjà, l’artiste avait été condamnée par le tribunal militaire pour « avoir humilié et terni la réputation des Forces de sécurité intérieure ». La jeune femme avait été poursuivie après avoir publié une vidéo comique dans laquelle on la voit appeler les FSI et demander s’ils pouvaient lui livrer des serviettes hygiéniques en raison des restrictions imposées pendant le confinement au Liban au milieu de la pandémie de Covid-19.

Cette nouvelle affaire marque le développement le plus récent dans une succession de campagnes contre les comédiens au fil des années. En voici les plus emblématiques :


Edmond Haddad et Rawiya el-Shab
En 2011, Edmond Haddad et Rawiya el-Shab ont été « condamnés à un mois de prison et à une amende de 200 000 livres libanaises pour violations de l’éthique et comportement aberrant lors d’une pièce d’improvisation en 2009 », selon le Centre SKeyes pour la liberté des médias et de la culture de la Fondation Samir Kassir. Selon le verdict, Edmond Haddad « a baissé sa braguette et a montré son sous-vêtement, alors que lui et Rawiya el-Shab racontaient des blagues graveleuses et politiques ». Dans une vidéo intitulée Le sous-vêtement qui a menacé la sécurité nationale, Edmond Haddad a déclaré, en 2012, que la raison derrière la condamnation est qu’il est « un acteur libanais qui croit en la liberté d’expression et d’opinion ».


Charbel Khalil
En février 2015, le comédien Charbel Khalil a comparu devant un procureur public suite à des plaintes déposées contre lui par le mufti de la République Abdellatif Deriane et par l’avocat Tarek Chandab.
Il avait publié une caricature montrant une femme dans une pose suggestive sur un lit devant une bannière noire similaire à celle du groupe État islamique, qui porte la mention « Allahu Akbar ». L’image était légendée : « Jihad al-nikah » (jihad sexuel). Charbel Khalil, proche du Courant patriotique libre, n’est pas un humoriste mais plutôt un écrivain et réalisateur de télévision. Il est également connu pour ses commentaires anti-LGBT et antiréfugiés syriens.


Ziad Itani
En novembre 2017, l’acteur et dramaturge satirique Ziad Itani a été détenu pour des accusations de « collaboration et communication avec l’ennemi israélien ». Environ quatre mois plus tard, il a été libéré sans caution. De plus, le premier juge d’instruction militaire Riad Abou Ghida a émis des mandats d’arrêt contre la lieutenant-colonel Suzanne Hajj Hobeiche, ancienne responsable du Bureau de lutte contre la cybercriminalité, et le pirate informatique Élie Ghabash, soupçonnés d’avoir fabriqué le dossier contre l’acteur. Ziad Itani a ensuite accusé la Sécurité de l’État de l’avoir « fait disparaître et torturé », selon Human Rights Watch (HRW). Commentant l’affaire quelques mois plus tard, HRW avait déclaré que « les autorités libanaises devraient mener une enquête approfondie et impartiale sur les allégations de disparition forcée et de torture de Ziad Itani aux mains de la Sécurité de l’État ».


Hicham Haddad
En 2018, le ministère public libanais a déposé une plainte contre le comédien Hicham Haddad après qu’il a ridiculisé le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane, l’ancien Premier ministre libanais Saad Hariri et le secrétaire général du courant du Futur Ahmad Hariri dans son émission « Lahon w bas » diffusée sur LBCI. Dans l’épisode en question, l’animateur s’est moqué de la prédiction du médium Michel Hayek selon laquelle les médecins conseilleraient au prince héritier saoudien de « manger moins de fast-food ». « Avec tout ce qui se passe dans la région, il lui conseille de manger moins de hamburgers ? Je lui conseille d’arrêter les campagnes, les arrestations, les frappes militaires », a ainsi déclaré Hicham Haddad. Dans l’épisode suivant, le présentateur est apparu en tenue de prison et s’est moqué, en chanson, du procureur qui a déposé la plainte contre lui. Suite à cela, le Conseil des juges a demandé au parquet de « prendre les mesures nécessaires pour engager des poursuites publiques ».


Toufic Braidi
Trois ans plus tard, l’influenceur des réseaux sociaux et comédien Toufic Braidi a déclaré que son passeport lui avait été retiré pour « insulte à la présidence ». Il a ajouté que la Sûreté générale lui avait informé que l’allégation était liée à une vidéo qu’il avait diffusée, plaisantant sur le nombre limité de pays auxquels les détenteurs de passeport libanais peuvent accéder sans visa. Selon le comédien, la Sûreté générale a expliqué que sa vidéo non seulement se moquait du passeport libanais, mais elle insultait aussi la présidence parce que le passeport comprend « le tampon du président ».


Nour Hajjar
En août 2023, le comédien Nour Hajjar avait été interrogé pendant 11 heures par la police militaire après la publication d’une vidéo le montrant sur scène racontant une blague sur l’armée libanaise sur la plateforme awk.word, une communauté de comédiens. Selon la vidéo en question, il a déclaré : « Avez-vous remarqué que tous les (coursiers de Toters) sont dans l’armée ? Pouvez-vous imaginer si Israël attaque (le Liban) et que toute l’armée est chez Toters ? Nous verrons arriver 30 cyclomoteurs à la frontière ! Une roquette, et nous éclabousserons Israël de sauce moutarde-miel. » Simultanément, Nour Hajjar avait également fait l’objet d’une seconde plainte déposée par un juge religieux, le cheikh Waël Chbaro, en raison d’une blague faite cinq ans plus tôt dans laquelle le comédien se moquait du comportement de ses parents lors d’occasions religieuses.

Share News