La journaliste Dima Sadek fait à nouveau l'objet depuis samedi d'une violente campagne lancée contre elle sur les réseaux sociaux, suite à sa publication d'une photo des défunts commandant iranien Kassem Soleimani et de l'ayatollah Ruhollah Khomeiny avec la légende "Les Versets sataniques". La photo a été mise en ligne par Mme Sadek en réaction à l'agression de l'écrivain britannique Salman Rushdie vendredi dans l'Etat de New York, aux Etats-Unis. Hospitalisé dans un état grave, ce dernier est menacé de mort depuis une "fatwa" de l'Iran datant de 1989, un an après la publication de son ouvrage "Les Versets sataniques".
"Je fais l'objet d'une campagne d'incitation publique au meurtre, lancée par Jawad Nasrallah", le fils du secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah, a écrit samedi la journaliste sur son compte Twitter. Elle demande que son tweet soit considéré comme une "notification" de la campagne adressée aux autorités libanaises, et fait porter au parti chiite "la responsabilité de tout ce que pourrait lui arriver à partir de maintenant". Elle a accompagné son message d'une capture d'écran d'un tweet d'un autre internaute selon lequel "faire couler le sang de Dima Sadek est une obligation morale".
"Outils" de certains régimes
Dans un tweet précédent, le fils de Hassan Nasrallah avait indiqué que "les régimes utilisent certains outils pour faire leur sale besogne, sans toutefois se salir eux-mêmes et un exemple de ces outils est ce poison qui les a dépassés dans sa décadence", avec le hashtag (mot-dièse) "Dima", accusant ainsi à mi-mot la journaliste d'agir pour le compte de régimes étrangers, comme Israël ou les Etats-Unis, ennemis jurés du Hezbollah.
Le centre SKeyes pour la liberté de la presse et de la culture a dénoncé dans un tweet également cette campagne "d'incitation et de menace de meurtre et de viol".
Dima Sadek, elle-même de confession chiite, est connue pour son opposition frontale au Hezbollah. Elle a déjà fait à plusieurs reprises l'objet d'une campagne de cyber-harcèlement de la part de partisans du parti pro-iranien et du mouvement Amal. En novembre 2019, elle avait déjà dénoncé une "incitation au meurtre" suite aux propos tenus par un dignitaire chiite, qui avait évoqué sa "crucifixion" et son "amputation en vertu de la charia".
Jawad Nasrallah fait parfois parler de lui pour ses sorties contre les opposants au Hezbollah. Il avait notamment été pointé du doigt pour avoir salué, en février 2021, l'assassinat de l'intellectuel Lokman Slim, tué par balles au Liban-Sud, dans un tweet publié peu après l'heure supposée du meurtre qu'il avait ensuite supprimé.
Par ailleurs, SKeyes a annoncé que le photographe Hassan Chaabane avait de nouveau fait l'objet de menaces à Beit Yahoun, son village dans la région de Nabatiyé au Liban-Sud. Début août, M. Chaabane avait déclaré qu'un groupe d'individus, qui seraient des partisans du Hezbollah, l'avaient attaqué en raison de vidéos et de messages publiés sur les réseaux sociaux au sujet d'habitants de la localité qui manifestaient contre les pénuries d'eau dans un pays en crise. Dans la nuit de samedi à dimanche, un inconnu a accroché un message sur le pneu crevé de la voiture du photographe sur lequel il était écrit : "Quitte le village, agent, chien".