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SKeyes Center for Media and Cultural Freedom - Samir Kassir Foundation

Justice pour Issam Abdallah

Vendredi 10 octobre 2025
Vers une action judiciaire du Liban deux ans après l’assassinat du journaliste par l’armée israélienne

Près de deux ans après la mort du journaliste de l’agence de presse Reuters Issam Abdallah, tué par une frappe israélienne alors qu’il était en reportage, le Liban engage enfin une démarche contre l’impunité : le gouvernement a chargé le ministère de la Justice d’examiner les actions possibles pour poursuivre les autorités israéliennes.

“Le chagrin ne s’atténue pas, il n’y a toujours ni justice ni responsabilité”, confie la sœur d’Issam Abdallah, Abeer Abdallah. Deux ans après la mort du photojournaliste de Reuters, justice n’a toujours pas été rendue pour le reporter de 37 ans assassiné le 13 octobre 2023 à Alma el-Chaab, au sud du Liban. Selon une enquête menée par RSF en 2023 et cinq autres enquêtes indépendantes, Issam Abdallah a été délibérément ciblé par les forces israéliennes, alors qu’il exerçait son métier. Ce qu’a encore confirmé le rapporteur spécial de l’Organisation des Nations unies (ONU) sur les exécutions extrajudiciaires, Morris Tidball-Binz, ce 10 octobre lors d’une conférence de presse au Liban : il a qualifié de “crime de guerre” cette “attaque préméditée, ciblée et en deux temps des forces israéliennes” qu’il considère comme “une violation évidente [...] du droit international humanitaire”


À l’approche de la date du deuxième anniversaire de la mort d’Issam Abdallah, le Conseil des ministres, sur l'initiative du ministère de l'Information, a quant à lui publié un décret officiel le 9 octobre, chargeant le ministère de la Justice 
“d'examiner les mesures juridiques appropriées à prendre en réponse aux attaques israéliennes visant des journalistes pendant la récente guerre”. En effet, deux ans après ce crime, aucune poursuites judiciaires n’ont eu lieu ni au Liban, ni en Israël – les autorités n’ont pris aucune mesure pour élucider le crime qu’ils nient avoir commis et se limitent à répéter qu’ils “examinent l’incident” –, ni au niveau international.


Pourtant, en 2024, le gouvernement précédent – celui de Najib Mikati – avait officiellement demandé à la Cour pénale internationale (CPI) d'étendre son mandat au Liban. En effet, l’article 12 du statut de Rome permet à un État non-membre de la CPI d'accepter la compétence de la Cour pour des crimes spécifiques sur son territoire en déposant une déclaration auprès du greffier de la Cour, sans que cela nécessite une ratification complète du Statut. La décision fut cependant annulée, et le nouveau gouvernement, en place depuis le 8 février, n’a toujours pas déposé cette demande auprès de la CPI.

“Le gouvernement libanais a franchi une étape importante en demandant au ministère de la Justice d’examiner les moyens de rendre justice à Issam Abdallah, ainsi qu’à ses confrères et à ses consœurs. Cela fait deux ans que le journaliste a été ciblé et tué par une frappe de l’armée israélienne et que Christina Assi, Dylan Collins, Carmen Joukhadar, Elie Brakhia, Thaer al-Soudany et Maher Nazeh ont été blessés en exerçant leur métier : la justice ne peut plus attendre. Cette initiative constitue un premier pas, et nous appelons le gouvernement à aller jusqu’au bout en demandant officiellement à la Cour pénale internationale d’exercer sa compétence pour enquêter sur les crimes commis au Liban contre les journalistes depuis octobre 2023. Comme l’a rappelé le rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires, Morris Tidball-Binz, cette ‘attaque ‘prémédité, ciblé et en deux temps’ constitue une ‘violation évidente [...] du droit international humanitaire, un crime de guerre’. L’impunité dont bénéficient les dirigeants israéliens qui en sont responsables a permis la répétition de ces crimes de guerre, au Liban comme en Palestine. Il est grand temps qu’ils répondent de leurs actes devant la justice.

Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient de RSF


Les deux frappes qui ont tué Issam Abdallah ont également blessé 
Christina Assi et Dylan Collins de l’Agence France-Presse (AFP)Carmen Joukhadar et Elie Brakhia de la chaîne de télévision  Al Jazeera, ainsi que Thaer al-Sudani et Maher Nazeh de Reuters. 


En septembre 2024, RSF et dix autres organisations avaient 
adressé une lettre aux Nations unies, appelant à l’ouverture d’une enquête officielle sur cette attaque. Le courrier avait été transmis à la Commission d’enquête de l’ONU chargée d’examiner d’éventuels crimes internationaux et violations du droit international relatif aux droits de l’homme commis en Israël et dans les territoires palestiniens occupés depuis le 7 octobre 2023. Par ce biais, RSF et ses cosignataires avaient également réitéré leur soutien à une demande similaire déposée par la famille d’Issam Abdallah en juin, restée jusqu’à présent sans réponse. “Le cas d'Issam est emblématique d'une culture d'impunité qui entoure le meurtre de journalistes,” affirme Abeer Abdallah à RSF. “Mon frère n'aurait pas dû être une cible, il aurait dû être protégé.”

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